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Histoire de l'architecture religieuse au Québec: de 1945 à la fin du 20e siècle

Publié par Mathieu Lavigne Mathieu Lavigne, dimanche le 21 février 2016

De 1945 à la fin du XXe siècle.

 

Église Saint-Jean-de-Matha, Ville-Émard, 1955.

Selon France Vanlaethem, le caractère épuré et lisse de cette église matérialise les valeurs de la modernité.

Source: ville-emard.com 

 

La fin de la Deuxième Guerre mondiale ouvre sur une période de dynamisme et de remise en question. L’Église elle-même sent le besoin de revoir ses pratiques, sa mission, son approche. L’architecture religieuse aussi se questionne. Au Québec, la modernisation rapide, la croissance démographique et l’essor de la banlieue favorisent la construction de nouvelles églises qui, avec l’utilisation maintenant massive de la voiture, doivent désormais être entourées d’un vaste stationnement (Bergeron, 2010). Avec les années 1950, on assiste à la victoire du rationalisme et du courant moderne international, un courant détaché de toute tradition et soumis aux exigences de l’industrialisation. Dès lors, on ne pourra plus prétendre que l’architecture religieuse québécoise est différente de celle pratiquée ailleurs (Bergeron, 1987, p.57 ; Vanlaethem dans Godin, 2002, p.52, 58-59). Ce renouveau architectural passe par la simplification, le dépouillement, la sobriété, des traits autrefois associés davantage au temple protestant : l’église catholique perd de son caractère monumental. On recherche une architecture fonctionnelle. L’utilisation du béton est de plus en plus répandue. Le clocher se distingue de moins en moins du reste de l’église, ou parfois, il en est carrément séparé.

Extérieur et intérieur de l'église Saint-Marc, La Baie, 1955-1956

Source: lactualite.com 

 

Réformes liturgiques et aménagement intérieur

La période suivant la Deuxième Guerre mondiale est marquée par un véritable bouillonnement d’idées au sein de l’Église catholique, dynamisme qui débouchera sur le concile de Vatican II (1962-1965) dont plusieurs décisions auront un impact sur l’aménagement intérieur des églises. Une des résolutions de ce concile est de favoriser la participation des fidèles à la célébration de la messe. Dès lors, on préférera bâtir des églises ayant un plan centré plutôt que longitudinal, comme c’était le cas auparavant. Le plan centré garantit une relation intime entre l’assemblée et l’autel, ce dernier devant être le point de convergence, le centre de l’attention. Les nouvelles églises seront plus basses, avec le chœur et la nef couverts d’une seule et même toiture afin de souligner l’union de ces deux espaces auparavant séparés (Bergeron, 2010). Désormais, le prêtre célébrera la messe face à l’assemblée, ce qui n’était pas encore le cas partout, ce changement illustrant la volonté de l’Église de se rapprocher des fidèles.

Intérieur et extérieur de l'église Notre-Dame-de-Fatima, Jonquière, 1962-1963

Architectes: Léonce Desgagné et Paul-Marie Côté

Daniel Chrétien décrit ainsi cet édifice: "L'église est composée de deux demi-cônes décalés faits de béton et réunis par une bannde de verre coloré par laquelle pénètre la lumière du jour. La forme conique rappelle celle des tipis et fait référence au passé autochtone de la région du Saguenay-Lac-Saint-Jean. L'église a été fermée il y a cinq ans."

Source: lactualite.com 

 

Dès lors, l’église n’est plus présentée comme la maison de Dieu pour laquelle rien n’est trop beau ni trop riche. Vatican II viendra confirmer l’idée que les églises sont avant tout les maisons du Peuple de Dieu. On exige toutefois qu’elles possèdent une « dignité incomparable », sans allure bourgeoise, ni prolétaire. L’esprit de pauvreté, qui est au premier rang des vertus évangéliques, inspirera désormais la construction et l’ornementation des églises (Bergeron, 1987, p.26-27).

Les dernières constructions

Les années 1960 furent le lieu d’une liberté encore plus grande dans la création architecturale. Par exemple, Roger D’Astous, qui étudia auprès du grand architecte américain Frank Lloyd Wright, se fera le précurseur d’un renouvellement encore plus radical de l’architecture religieuse, comme l’illustre l’église Saint-Jean-Vianney dont il fut le principal maître d’œuvre (Bergeron, 1987, p.26-27). Un nouveau lyrisme plastique émerge durant cette période, nourri de références à la fois industrielles, archaïques et même zoomorphiques.

Église Saint-Jean-Vianney, Montréal, 1964

Architectes: Roger D'Astous et Jean-Paul Pothier

Selon Vanlaethem, cette église s'insère parfaitement dans la morphologie urbaine et assume pleinement la révolution automobile déjà bien entamée à l'époque de sa construction.

Source: imtl.com 

Église Notre-Dame-d'Anjou, Anjou, 1961-1962

Architecte: André Blouin

Toujours selon Vanlaethem, cette église est un exemple de référence zoomorphique, son plan se déroulant comme un escargot.

Source: lactualite.com 

 

Depuis les années 1970, la construction de nouvelles églises est plutôt rare en raison du nombre décroissant de pratiquants. Notons toutefois la construction, au début des années 1990, de la vaste église de l’abbaye de Saint-Benoît-du-Lac, une abbatiale* faite notamment d’acier (Bergeron, 2010). Aujourd’hui, des questions difficiles se posent; des choix déchirants sont à prévoir. Que faire de notre patrimoine religieux, un patrimoine qui, comme le montre modestement cet article, est particulièrement riche? Quelles églises sauvegarder? Et que faire avec les établissements jugés moins importants sur le plan historique et architectural? Voilà des questions qui devraient alimenter l’actualité pour plusieurs années encore.

* L’abbatial est l’église principale d’une abbaye. Ainsi, comme nous le  mentionnons plus haut, l’abbaye de Saint-Benoît-du-Lac a été construite dans les années 1990.


Note

Dernier billet d'une série de 10 billets sur l'architecture religieuse au Québec. Consultez l'introduction (premier billet) pour accéder à la table des matières.

Médiagraphie

Monographies

Bergeron, Claude. 1987. L'architecture des églises du Québec (1940-1985). Québec, Presses de l'Université Laval. 383 pages.

Godin, Colette, dir. Montréal. 2002. Montréal, la ville aux cents clochers. Regards des Montréalais sur les lieux de culte. Avec la collaboration de Jean-François Leclerc. Collection Images de société. Montréal. Fides. 112 pages

Sites internets

Bergeron, Claude. Architecture religieuse. L'Encyclopédie canadienne. www.thecanadianencyclopedia.com/index.cfm?PgNm=TCE&Params=F1ARTF0006766#SEC903362 (page consultée le 9 février 2010)

Chrétien, Daniel. « Sur la route des églises », L’actualité.com, [En ligne],http://www.lactualite.com/societe/sur-la-route-des-eglises (Page consultée le 28 août 2010)